mardi 22 mai 2007

L'INTER-LABORATOIRES IMPROMPTU, NANCY-METZ, BRUXELLES, LYCEE CYFFLE

Claire Piette, Françoise Labridy
Que s'est-il passé ce samedi là, qu'avons nous bricolé, les un(e)s, les autres pour qu'une conversation se mette rapidement en place entre les membres du laboratoire de Nancy-Metz (une quinzaine de personnes) et des enseignants (une quinzaine) du lycée Cyfflé qui auraient dû faire entre eux un groupe de réflexion sur «les élèves en difficulté ».

Françoise a proposé que nous nous accueillions mutuellement puisque cette rencontre étant imprévue, chacun pouvait donc la saisir pour parler des impasses qu'il rencontre dans sa pratique quotidienne. Claire me fait remarquer que déjà se répartir autour de la table, en mélangeant les participants, c'était une façon de ne pas constituer l'imaginaire de ceux qui viendraient donner des leçons à d'autres et qu'en suite présenter de manière minimaliste le CIEN pour laisser place à l'imprévu de la rencontre, c'était déjà un pari.

Aussitôt cela a commencé, un des enseignants vient déposer une plainte concernant une élève qui ne cesse de vouloir sortir de classe, « pour aller aux toilettes ». Il nous fait entendre qu'il a déjà tout essayé, tout dit et qu'il ne voit pas de solutions. A la suite de plusieurs prises de paroles, où il s'interroge sur s'il doit ou pas la laisser sortir en évoquant à chaque fois les conséquences négatives ou positives, Claire l'interrompt sur les « conséquences » qui en découlerait. Cette demande de précision le met en position d'entendre un petit peu autrement ce qui résonne subjectivement dans le mot « conséquence », il se surprend à répéter « conséquences », comme s'il entendait soudain que son discours se fondait sur des éventualités « dramatiques » et qu'il en était prisonnier pour poser un acte singulier vis à vis de cette jeune fille. Car en effet, un peu avant, il avait glissé l'idée que des adolescentes pouvaient se scarifier ou se couper les veines. Aucun émoi, ni fascination devant cette éventualité n'est manifesté par les participants, c'est au contraire un feu d'artifice nourri de propositions et rebonds successifs qui lui répond ; une participante lui relate comment à sa surprise lorsqu'elle demanda à un élève qui souvent aussi voulait sortir, s'il pouvait attendre, avait dit oui. Un déplacement opère, des possibles autres que ceux des modèles que nous avons chacun dans la tête, peuvent faire effet d'invention, à condition de ne pas savoir a-priori. Pour cette jeune fille en fin de compte, nous avons trouvé comme hypothèse de travail, qu'il y avait peut-être lieu de la surprendre en l'interpellant à l'heure habituelle pour lui demander si elle, avait quelque chose à demander.

Deux autres enseignants parlent ensuite pour évoquer des élèves qui ne demandent rien, là aussi recherche de précisions et au décours de la conversation, là où il s'avère que les enseignants attendaient d'une instance extérieure la solution, s'aperçoit soudain qu'ils pourraient être une adresse de la situation insupportable relatée. La démonstration en est faite par l'enseignant-stagiaire, parlant en dernier, disant qu'il ne sait pas, mais se risquant à nous dire ce qu'il a mis en place pour un de ses élèves, il a accepté qu'il ne rende pas un devoir, mais écrive quelque chose, l'élève lui demande alors : « ce que j'ai à écrire doit il être cash ?», l'enseignant opina et reçut un long courrier de ce jeune, pas sans lien, semble-t-il à la valeur dans l'Autre que ce jeune cherchait désespérément. En disant oui, l'enseignant n'avait-il pas ouvert à cet élève, la porte de l'inconnu qui cherchait en lui un chemin ?

Dans le cours de cette conversation, il fut entraperçu que ce qui était adressé aux professeurs restait énigmatique, comme pour les élèves vraisemblablement ; mais de cette position d'enseignant nous avions à accepter l'accusé de réception dans l'adresse que nous constituons auprès de ces élèves. N'avions-nous pas d'ailleurs accepté d'occuper cette position pour ces collègues en ouvrant l'espace pour inventer ensemble en restant vigilant à ne pas tomber dans des cadres de références établis ?

Aucun commentaire: