jeudi 8 février 2007

« Cien de vie !!! », résumé de la soirée du mardi 11 avril

Nous partons de l’extrait de Le malentendu de l’enfant, « La gourmandise du surmoi ou l’impératif de jouissance ». Je tente de dire ce que j’ai saisi du texte, au travers du paradoxe des signifiants, parfois enserrants, etouffant le sujet, et parfois le libérant, l’apaisant. (voir texte en pièce jointe) Je prends l’exemple de la mère d’un élève, lorsqu’elle en passe par des signifiants pour m’interpeler sur la place que je prends vis-à-vis de son fils et qui lui est insupportable, car elle participe d’une séparation que la mère ne peut pas soutenir. Moment de silence, chacun réfléchit. (je n’ai pas tjrs noté qui a dit quoi, chacun se reconnaitra) Il se dit que la mère manifestement va chercher des S2, de façon indirecte, au lieu de s’adresser à moi directement. C’est là qu’intervient le Surmoi. Les S2 articulent une partie de jouissance du sujet, cad que le sujet à cet endroit est sous l’injonction de signifiants. Ex : « Je n’ai fait qu’appliquer ces principes. » La mère met en avant ce qui est de l’ordre d’une déduction, d’une logique, de quelque chose qui fait Loi pour elle. Elle me place avec elle du côté du Savoir : les adultes ont à appliquer quelque chose.
Roselyne intervient avec un autre exemple pour mettre en avant à quels endroits on peut saisir que le Surmoi entre en jeu. Elle parle d’un élève de SEGPA, qui arrive d’un autre collège un matin car il s’est fait virer. Il est en proie à une agitation débordante, fait le caillon dans les classes et fait un peu, voire beaucoup, peur aux profs. En classe, Roselyne repère qu’il en passe soit par une violence envers les autres (insultes), soit par une violence envers lui-même (il se plante des coups de compas dans la main) Au départ, Roselyne dit qu’elle aussi elle se sent dépassée par l’arrivée de Gilles, et se dit : « Oh non j’en peux plus, j’en peux plus. » Les autres de l’équipe pédagogique et l’administration font une réunion d’urgence pour écraser le sujet, ce que Roselyne appellera ²prendre une position surmoïque². Ils reprennent le ²dossier² de l’élève, l’accable un peu plus. Position qu’elle se refuse de prendre, elle veut saisir d’ou vient cette violence exprimée par cet enfant. Elle s’est rendue compte qu’il s’agitait bcp dès qu’il y avait de la lecture ou de l’écriture. Elle comprend qu’il ne sait pas lire. C’est à partir de là qu’elle peut se décaler et l’interpeler sur ça, en lui proposant de lui apprendre à lire, et non pas en lui disant en classe « Lis ! ». Roselyne se rapproche de lui par différents biais, le touche et rit avec lui, ce qui fait apparaître l’élève, aux yeux des autres, comme un autre sujet, capable de lien social. Ce n’est plus celui qui fait peur et qui est capable du pire. Le chef d’établissement par exemple se met alors à lui parler dans la cour, tranquillement. Là où l’enfant ne peut pas régler le Réel par le Symbolique (il ne sait pas lire et écrire, jouer avec les mots), il passe à l’acte (injurie, se pique).
Ce que Roselyne a inventé : Elle lui dit : « il y a des règles de l’apprentissage que tu dois respecter en classe, en étant là et en permettant qu’elles existent (l’écoute, le calme, différents temps de travail), mais toi, tu peux apprendre aussi, on va aménager ce temps autrement pour toi. » Ca change l’adresse à l’Autre, se crée alors un lien de singularité. Elle décomplète un Autre persécuteur, elle lui ouvre un autre chemin que ça.
Le signifiant ²dossier² devient un possible pour Gilles, et non plus le signifiant associé à l’épaisseur de son cas, relevant certainement d’un de ces enfants du rapport de l’Inserm. Cette fois, Roselyne lui propose un apaisement à sa jouissance, un petit plus de jouir et non pas une jouissance folle : un dossier pour sa singularité, dans lequel il pourra écrire, faire avec sa condition de sujet. Ca localise sa jouissance et il peut alors s’en faire sujet, d’où la demande exprimée d’un vélo et l’envie de signer de son nom l’affiche sur laquelle il inscrit cette demande.
Au départ, les profs refusent de lui donner ce nouveau dossier, marque trop significative d’une différence, de l’incomplétude de la pédagogie visant une uniformité et une culture commune. Le surmoi didactique se résume alors dans l’injonction : ²propose la même chose comme enseignement.² ²On ne doit pas faire du cas par cas, le groupe avant tout, aménageons mais pas trop.² Ils ne peuvent alors pas penser l’impuissance symbolique dans laquelle se trouve Gilles, qui ne sait pas lire et écrire. Il ne semble pas possible pour eux de partir du manque, ils restent coincer du côté de « utiliser le dossier, ce serait dire que je ne maîtrise pas, que je n’ai pas la compétence pour pallier à. »

Les signifiants ont parfois une fonction d’arrêt, cad qu’ils nomment qqch (exemple : ²pas étonnant que Gilles soit comme ça : il a un ²dossier² épais comme ça !²), alors qu’il y a lieu de remettre en circulation le désir ; refaire circuler les signifiants pour ne pas qu’ils fixent le symptôme et stygmatisent un sujet. Car les signifiants peuvent empêcher aussi de penser au-delà de cette psycho-pathologisation. Par exemple, dans l’histoire de cette mère d’élève qui parle de « principe de précaution », il y a le présupposé de croire que tout le monde s’accorde sur cette définition et que tout est dit. Ca empêche de parler de l’angoisse, c’est un discours hysthérique dans lequel le sujet fait des généralités, sans équivoque. Alors qu’il y a lieu d’user de l’équivoque de la langue, pour justement faire apparaître les dialectiques dans lesquels nous sommes pris. Quand on épingle un sujet, cad qu’on l’étiquette, on ne le laisse plus être dans son opacité subjective dont parle Lacadée (P111). Et il s’agit de trouver la modalité de parole qui va permettre au sujet de ne pas fixer l’Autre. Concernant le problème de fixation, Lacan l’a déplacé en usant du questionnement. Par exemple, au lieu de parler de la structure hysthérique, il résume cela par la question : ²Suis-je homme ou femme ?², au lieu de dire structure obsessionnelle, il dit :²Suis-je mort ou vif ?² C’est un moyen ici de dépasser la question de la structure.

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